Buquet final
Le FC Metz a perdu plus qu'un match hier face à Rennes (2-3). Il pourrait se voir priver injustement de Georges Mikautadze, son meilleur buteur lors des deux dernières journées. Les décisions iniques de Ruddy Buquet ont lourdement influencé le résultat final de cette rencontre qui restera dans les mémoires. Si sa prestation a été l'une des pires ces dernières années à St-Symphorien, il serait injuste de réduire la carrière de Buquet à un match.
Comme Pierre Gaillouste lors d'un Metz-Guingamp ubuesque en septembre 2022, Ruddy Buquet ne devrait pas croiser la route du FC Metz avant un moment. L'arbitre picard est actuellement le plus expérimenté du championnat de France de Ligue 1 avec plus de 300 matches dirigés. Sa prestation cataclysmique samedi lors d'un match à fort enjeu entre le FC Metz et le Stade Rennais ne lui confère aucune indulgence. Comme Jérémie Pignard qui était passé complètement à côté de son match à Marseille récemment, Ruddy Buquet sera-t-il laissé au repos lors de la 33ème journée de Ligue 1 le week-end prochain ? On peut en douter. Buquet est un bon soldat aux yeux de la Direction de l'arbitrage. Son absence lors d'un championnat d'Europe ou d'une Coupe du Monde en dit beaucoup sur son manque de personnalité et de charisme. Buquet s'est fait, laissé marcher dessus alors qu'il était le meilleur arbitre français entre 2014 et 2018, réalisant notamment une saison 2014-2015 et 2015-2016 exceptionnelles. En mai 2015, il termine en tête du classement des arbitres de Ligue 1 et se voit remettre le trophée UNFP du meilleur arbitre de l'élite, qu'il obtiendra à quatre reprises. Mais la Direction de l'arbitrage dirigée alors par Pascal Garibian, attribue la meilleure note DTA - "une note de vie scolaire", avaient expliqué Stéphane Lannoy et Saïd Ennjimi lors d'un entretien accordé à Pierre Ménès sur Canal+ en mai 2015 -, à Clément Turpin qui est donc classé à la première place. Un véritable scandale.
Le Poulidor de l'arbitrage français
La saison suivante, Ruddy Buquet est encore plébiscité par ses pairs et pour cause : il est choisi pour diriger les matches les plus médiatiques et les plus électriques de Ligue 1. Marseille-Lyon, Bastia-Monaco, PSG-Lyon, Marseille-PSG, Lyon-Monaco. Rappelons qu'à ce moment-là, Clément Turpin est retenu de façon très heureuse pour prendre part à l'Euro qui a lieu en France. Buquet aurait dû être l'arbitre représentant la France à cet Euro mais il n'intégrera jamais le groupe élite de l'UEFA, celui dont il faut faire partie pour prétendre à participer à une Coupe du Monde ou à un championnat d'Europe. Une injustice qui en dit long sur la gouvernance de l'arbitrage français, véritable état dans l'état dont les présidents successifs à la FFF, ne s'intéressent guère. A la fin de sa carrière qui aura été remarquable, Buquet n'aura dirigé ni Coupe du Monde ni championnat d'Europe quand Turpin aura connu l'ivresse de deux Coupes du Monde (peut-être une troisième en 2026) et de trois championnats d'Europe. L'arbitre vosgien Benoit Bastien pourra d'ailleurs faire le même constat. Cela illustre la docilité des hommes en noir qui n'osent pas contredire le système. Buquet en est la victime mais aussi le responsable. Il n'a jamais pris la parole dans les médias pour dénoncer ce système qui fait et défait une carrière. Pire, il a accepté d'être le quatrième arbitre de Clément Turpin en Ligue des Champions. C'est un peu comme si Joël Quiniou avait été le remplaçant de Michel Vautrot. Impensable.
Un pactole substantiel de 13900 € par saison arbitrée en Ligue 1
En 2024, les jeunes arbitres sont en admiration devant les Clément Turpin, François Letexier ou Willy Delajod. Mais ils ne connaissent pas Michel Vautrot, Joël Quiniou, Robert Wurtz, Gilles Veissière qui ont longtemps fait briller le sifflet tricolore aux quatre coin de la planète. Ils faisaient partie d'une génération d'arbitres qui étaient guidés par la passion, appréciés par les joueurs, les entraîneurs et adulés par le public. Aujourd'hui, les arbitres de Ligue 1 sont obnubilés par deux choses : leur carrière et leur compte en banque. Ils n'ont jamais gagné autant d'argent qu'actuellement. La LFP consacre plus de 17 M€ à l'arbitrage professionnel, l'équivalent d'un budget d'un club figurant dans le top 10 en Ligue 2. Un arbitre de Ligue 1 a droit à une indemnité de 3375 € par match quand leurs collègues arbitraient un St-Etienne-Marseille dans les années 70 pour... 40 francs. Cela devrait les faire réfléchir. "Ce sont des robots friqués", disait Gilles Veissière au moment d'une grève menée en 2011 par le Syndicat des arbitres du football d'élite (SAFE), ce syndicat qui a déjà pris le football professionnel en otage à plusieurs reprises au cours de la dernière décennie. Grâce à l'action de Frédéric Thiriez, président de la LFP de 2002 à 2016 et indésirable aux yeux de la corporation arbitrale, les arbitres de Ligue 1 bénéficient d'un pactole substantiel de 13900 € par saison arbitrée en Ligue 1. Une sorte de retraite chapeau dont beaucoup ignorent l'existence. La limite d'âge - fixée à 45 ans -, ayant été abrogée il y a quelques années, les arbitres peuvent désormais faire durer le plaisir, à la condition qu'ils réussissent les tests physiques de plus en plus exigeants. L'aspect financier entre inévitablement dans leur réflexion.
Un arbitre doit savoir reconnaître son erreur
Ruddy Buquet a revu son match à St-Symphorien. C'est une personne d'une grande honnêteté et intégrité pour l'avoir côtoyé à plusieurs reprises. Mais il ne peut maintenir le carton rouge ubuesque infligé à Georges Mikautadze, le joueur le plus important et le plus décisif du FC Metz. S'il a une conscience - ce que je pense bien évidemment -, Ruddy Buquet doit adresser un rapport complémentaire à la Ligue de Football Professionnelle (LFP) pour faire annuler ce carton rouge et permettre à l'attaquant messin d'être aligné à Strasbourg dimanche prochain. Il en va de l'avenir d'un club professionnel, menacé par une descente en Ligue 2 et de toutes les conséquences sportives, humaines et économiques qui en découlent.
Lionel Schneider
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