Que deviennent-ils ? Portrait de Jean-Philippe IZZO, ancien arbitre assistant FIFA
Fidèle assistant de Bruno Coué durant plus d’une décennie, Jean-Philippe Izzo a quitté les terrains de l’Hexagone il y a huit ans. Passionné de sport hippique, il partage volontiers ses deux passions.
Sens. 1968. C’est ici, dans l’Yonne, que Jean-Philippe Izzo a commencé à taper dans le ballon. « N’ayant pas les qualités pour jouer au plus haut niveau, je suis devenu éducateur. Mon club ayant besoin d’arbitre afin d’être en conformité avec les statuts m’a proposé de prendre le sifflet » explique celui dont le frère, Stéphane dirige le centre de formation de l’AS. Cannes et qui a grandement contribué notamment, à l’éclosion de Vincent Koziello, qui évolue chez les Aiglons. Jean-Philippe Izzo sait ce qu’il veut. « Dans ma tête c’était très clair, si j’y allais c'était pour essayer de connaître le haut niveau ». Son tout premier match, il s’en souvient comme si c’était hier. « C’était il y a presque 30 ans ! Un match de benjamins excellence au niveau départemental entre les deux meilleurs clubs du District de la Côte d’Azur : OGC Nice-AS Cannes. Ca jouait le titre. Le match avait eu lieu sur le terrain de Gorbella, qui jouxtait le Stade du Ray devant plus de 500 personnes ! ». Jean-Philippe Izzo a trouvé sa voie. « Je me suis régalé sur ce match et cela m’a encore donné plus envie ». Sept ans après avoir débuté, il décroche son macaron fédéral qui lui permet de découvrir les championnats nationaux.
Promu arbitre assistant Fédéral 1 en 1997, Jean-Philippe Izzo fait ses débuts en 1ère Division lors de Lens-Auxerre, le 2 août 1997 devant 30 000 spectateurs au Stade Félix Bollaert. Ce match marque le début d’une collaboration avec le marseillais Bruno Coué (photo ci-contre), qui va durer dix ans. « Avec Bruno et Jacques Clavet, nous nous sommes régalés car nous avions la passion du football en commun et une très grande amitié entre nous ».
Bruno Coué
L’Ile de Beauté et soudain…
Quand Jean-Philippe Izzo arrive en 1ère Division, il est loin d’imaginer le formidable parcours qu’il va réaliser. Loin d’imaginer aussi que sa vie aurait pu basculer, un soir de mars 2003. Tout est pourtant réuni pour passer une belle soirée avec comme cadre idyllique l’Ile de Beauté et le stade François Coty à l’occasion d’Ajaccio-Lens, comptant pour la 29ème journée de Ligue 1. Lors du retour à leur hôtel, en voulant récupérer leurs affaires, une voiture vient percuter Bruno Coué, l’arbitre du match et son assistant Vincent Texier. Une triple fracture de la malléole pour le premier, une double fracture du tibia péroné pour le second. Jean-Philippe Izzo, qui parviendra à se jeter sur le trottoir, évitant le chauffard et Dominique Fraise, quatrième arbitre ce soir-là s’en sortiront sans la moindre blessure. « Cette date restera gravée dans ma mémoire même si je n’ai pas été touché dans ma chair. Avoir vu Bruno et Vincent dans un tel état avait été un choc. Mais le principal est que tous les deux aient pu retrouver le chemin des terrains quelques mois après pour finir leur carrière de magnifique façon » se souvient Jean-Philippe.
Jean-Philippe Izzo lors de d'Algérie-Egypte, CAN 2004
Ce n’est que le début de l’ascension de ce roi du drapeau, qui apprend quelques mois plus tard sa sélection pour la Coupe d’Afrique des Nations en 2004 sur le sol Tunisien. Jean-Philippe Izzo y accompagne le luxembourgeois Alain Hamer. « La CAN 2004 est un excellent souvenir à plusieurs titres. Au niveau footballistique, cela m’a permis de découvrir une ambiance et un jeu plus exotiques. Je pense avoir démontré que j’avais le niveau d’une telle compétition car, malgré un accueil réticent au début, j’ai arbitré au total cinq matchs. Trois rencontres de phases de poule dont un bouillant Algérie-Egypte (photo ci-dessus), un quart et une demi-finale » se souvient Jean-Philippe, pas vraiment dépaysé par le contexte africain. « Nous avons été formés en arbitrant sur les terrains de Division d’Honneur dans la région marseillaise ou de CFA-CFA2 en Corse ». Un arbitre africain retenu pour un championnat d’Europe, est-ce possible ? « L’arbitrage africain est trop politisé. Le président de la CAF (Confédération Africaine de Football), qui régnait comme un despote sur le football, les désignations d’arbitres et le reste, était très craint par mes collègues africains. L’Afrique restera l’Afrique. Mais je crois qu’il faut retenter l’expérience (Gamal Al Ghandour, un arbitre Egyptien avait participé à l’Euro 2000) ».
« San Siro : j’ai pleuré en rentrant sur le terrain »
Inter-Milan AC, ½ finale de Ligue des Champions devant plus de 85 000 personnes (source photo : news.dipag.com)
Deux mois plus tard, ce passionné de sport hippique – nous en reparlerons plus loin – se retrouve aux côtés de Gilles Veissière, « un phénomène de l’arbitrage qui respirait le foot » et de Frédéric Arnault dans l’un des temples du football, Giuseppe Meazza pour la ½ finale de Ligue des Champions entre les deux clubs de Milan. « Le rêve absolu. Trois niçois à San Siro ! Je croyais rêver. J’avais fait venir mon père, mon frère et mon fils de 12 ans à l’époque qui adorait le foot. Ce fût la deuxième fois que je pleurais en entendant l’hymne de la Ligue des Champions. C’était énorme. Le football Italien régnait en maître sur l’Europe à cette période avec trois demi-finalistes (le Milan AC remportera la compétition face à la Juventus) » raconte Jean-Philippe et poursuit : « Beaucoup de gens avaient suivi le match et on m’en a très souvent parlé. Il y avait 85 000 personnes ! Au retour de ce match, nous étions reconnus et félicités. Nous avions acquis nos lettres de noblesse dans l’arbitrage. Assurément mon plus grand souvenir. Quel pied ! » se rappelle l’intéressé, qui en garde un merveilleux souvenir.
INTER MILAN-MILAN AC - 1/2 FINALE DE LIGUE DES CHAMPIONS SAISON 2002/2003
« Sars méritait dix fois d’aller au Mondial 2006 »
En trois ans, Jean-Philippe Izzo va goûter à trois demi-finales de Coupe d’Europe. Deux ans après Inter-Milan AC, il est appelé à accompagner Alain Sars, « un très grand arbitre », en avril 2005 sur la demi-finale aller de Ligue des Champions entre Chelsea et Liverpool. L’arbitre lorrain sera, la saison suivante à nouveau présent dans le dernier carré mais ne sera pas retenu pour le… Mondial 2006. « Sa non sélection est une grosse arnaque politique. Sars méritait dix fois cette consécration. Ce fût le début de la fin de l’arbitrage français au haut-niveau. Éric Poulat, qui lui avait été préféré, ne s’est jamais remis de son échec à la Coupe du Monde et a terminé sa carrière la dessus. Poulat n’était pas prêt pour faire une Coupe du Monde et sa sélection non méritée a précipité sa fin et celle de Michel Vautrot aussi. Un véritable scandale », explique Jean-Philippe.
L'hippodrome de Cagnes/Mer (source photo : www.cotedazur-tourisme.com)
Après avoir pris un peu de recul avec ses activités professionnelles, Jean-Philippe Izzo passe une grande partie de ses journées à l’hippodrome de Cagnes/Mer qui se trouve à deux pas de son domicile, à Villeneuve Loubet et qui tient une place importante dans la vie économique et touristique de la ville de Cagnes. « Je sors et trotte mes chevaux le matin et je vais aux courses l’après-midi. Je possède une licence amateur qui me permet de temps en temps de courir en course. J’ai gagné d’ailleurs avec l’un de mes chevaux le 24 décembre à Cagnes une course PMU. Un sacré cadeau de noël ! ». L’homme en noir Niçois est resté ce passionné de football qu’il était à ses débuts. Après avoir été à la Coupe du Monde au Brésil où il fit la rencontre de Jean-Michel Aulas dans un restaurant de Coppabana, Jean-Philippe Izzo assiste à tous les matchs de son club de cœur, l’OGC Nice et se rend régulièrement dans les grands stades européens. Il était au Camp Nou la saison dernière pour Barcelone-PSG et Atletico-Réal le lendemain. En novembre 2015, il fût présent à Wembley pour Angleterre-France, une semaine après les terribles attentats de Paris.
Du terrain de Gorbella à San Siro, les années passent mais Jean-Philippe Izzo ne se lasse pas de ce football qui lui a fait découvrir tant de stades, de cultures et tant d’émotions.
Gilles VEISSIERE
« Gilles est un passionné dans tout ce qu’il entreprend sinon il ne le fait pas. Je l’ai rencontré à l’hippodrome de Cagnes/Mer alors que nous étions déjà arbitres. Nous partageons cette passion pour le sport hippique puisque nous avons une dizaine de chevaux en commun au sein d’une écurie dans laquelle nous sommes associés. 20 ans que ça dure ! Dans l’arbitrage, il ne voulait rien laisser au hasard et il aimait que son équipe soit à fond avec lui dans son approche du match comme dans sa réalisation. Je n’ai que de bons souvenirs avec lui. Il était exigeant avec ses assistants comme il l’était avec lui-même. Cela n’empêchait ni les discussions ni les prises de bec. Chaque semaine, nous avions l’occasion de débriefer nos matchs à l’entraînement car nous n’étions jamais d’accord. Les entraînements en commun avec Claude Colombo, Gilles Veissière, Bruno Coué, Frédéric Arnault, Éric Castellani, Bernard Marek et moi-même, sous la houlette de notre préparateur physique dès 1997, nous permettaient de tout remettre à plat et d’avoir plusieurs avis sur des faits de jeu bien précis. Pour nous, les vrais contrôleurs de nos matchs étaient nos collègues d’entraînement qui nous « rappelaient » dès le lundi soir notre mauvais match du week-end, ce qui créait une totale émulation »
La saison de l’OGC NICE
« Cette année, on se régale à suivre le GYM. L’amalgame trouve par Claude Puel avec tous ces jeunes et l’apport de Ben Arfa est un plaisir pour tous les supporters. Ben Arfa est bien sûr un phénomène hors norme dans le football et le fait qu’il ait mûri l’a aidé à se concentrer sur son jeu. On a vécu de très grands moments depuis le début de saison avec les victoires à Bastia , Saint Étienne, Rennes et surtout Marseille avec des buts et la manière. Pour le 10ème budget du championnat, se retrouver 3ème à 12 journées de la fin est un rêve. J’espère qu’ils resteront dans le top 4 même si cela va être difficile. Mais au moins, on aura vu du spectacle ! »
Alain HAMER
Alain Hamer
« Alain aussi, aurait mérité d’aller à la Coupe du Monde en 2006. J’avais effectué toute la préparation avec lui et nous avions été désignés sur une ½ finale de Coupe de l’UEFA en mai 2005. Il fût un excellent arbitre mais appartenait à une fédération (luxembourgeoise) qui n’avait pas d’influence dans les instances. Cela restera comme un grand regret de ne pas avoir participé au Mondial allemand avec lui. Je pense que nous la méritions. Alain était vraiment un bon mec. On avait tourné ensemble pendant deux ans pour préparer la Coupe du Monde sur les terrains de France et d’Europe. L’entente était parfaite et il était à l’écoute pour progresser »
Ses souvenirs à St-Symphorien