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Alors que le début de saison est plutôt calme sur les terrains, c'est en coulisses que les hommes en noir s'offrent une nouvelle crise interne. Eric Castellani, ancien arbitre assistant international et président du SAFE (2008-2010) nous éclaire sur cet énième feuilleton arbitral.

Le président du SAFE suspendu !

"On va bien se marrer dans les semaines à venir"...Telle fût la conclusion de Pierre Ménès suite à l'interview de Saïd Ennjimi et Stéphane Lannoy le 27 mai dernier sur le blog de l'actuel chroniqueur du CFC. Le bouillant journaliste sportif de Canal+ avait vu juste. Entendu le 10 septembre dernier (lire par ailleurs) par le Comité Exécutif de la FFF, l'actuel président de la commission régionale des arbitres de la Ligue du Nord Pas de Calais a été fixé sur son sort. La Fédération, par le biais d'un communiqué publié sur son site a annoncé une sanction de 5 mois de suspension dont quatre avec sursis. En écartant Stéphane Lannoy des terrains pendant 1 mois, les instances du football français ont sanctionné le président d'un syndicat qui avait souhaité exprimer un ras le bol général. Mais le petit "monde" de l'arbitrage français n'accepte pas la critique, c'est connu  Lannoy, qui devait arbitrer le derby Nantes-Rennes dimanche dernier avait été remplacé par Wilfried Bien, la suspension du sifflet nordiste prenant effet à compter du vendredi 11 septembre. Celui qui dirige des matches de Ligue 1 depuis 2002 avait dénoncé "la gestion autocratique" de Pascal Garibian, le Directeur Technique de l'Arbitrage.

Stéphane Lannoy

Samedi dernier, le SAFE (Syndicat des arbitres du football d'élite) a fait savoir "qu'il condamnait fermement la sanction infligée à Stéphane Lannoy et que son bureau allait se réunir dans les prochaines heures pour décider des suites à donner." Lundi, le SAFE, par le biais d'un communiqué annonçait la démission de Lannoy ( voir le communiqué). Le syndicat crée en 2006, qui regroupe 146 adhérents soit 99,5 % de la population des arbitres de L1, L2 et les arbitres centraux de National, ressemble à une IVe République à l'instabilité chronique avec pas moins de 6 présidents en moins de dix ans.

L'avis d'Eric Castellani, ancien arbitre assistant international et ex président du SAFE de 2008 à 2010 sur la suspension de Stéphane Lannoy

"La sanction de Lannoy est scandaleuse. Même si les paroles de Stéphane sont dures à entendre pour la DTA, qui au passage reste silencieuse à toute critique, elles sont émises par le président du SAFE et non dans sa fonction d'arbitre. Dès lors, on voit bien les moyens mis en place pour éteindre toutes les velléités à l'encontre de la DTA."

Eric Castellani

La CFA désavouée

Le COMEX de la FFF n'a donc pas suivi la Commission Fédérale d'Arbitrage présidée par Eric Borghini qui avait suggéré 6 mois de suspension à l'encontre de Lannoy et un an ferme pour Saïd Ennjimi. L'organe politique de l'arbitrage français qui est à l'aube d'une nouvelle crise à quelques mois de l'Euro a été désavouée. "La démission de Stéphane Lannoy est un signal d'alarme lancé aux instances fédérales" nous explique Laurent Ugo, l'un des deux vice-présidents du SAFE et présent avec Stéphane Lannoy au Mondial 2010. Samuel Chevret, l'avocat du SAFE expliquait dans les colonnes du Parisien (15/09) que Stéphane Lannoy allait saisir le CNOSF et certainement le tribunal administratif pour contester sa sanction.

L'avis d'Eric Castellani

"La CFA a été désavouée mais pas son président qui souffle le chaud et le froid à l'image du personnage très politique et courtisan, pour acheter une paix sociale à n'importe quel prix. Cela en devient pathétique."

Le Syndicat des arbitres doit-il être dirigé par un ancien arbitre ?

Depuis la création du syndicat en 2006, les présidents qui se sont succédés ont toujours cumulé leur fonction d'arbitre avec celle de président. Le bureau du SAFE, qui se réunit vendredi prochain, pourrait se pencher sur cette hypothèse.

L'avis d'Eric Castellani

"Nous étions seulement deux, au moment de la rédaction des statuts du SAFE, à en émettre cette idée. Mais après réflexion, même dirigé par un ancien arbitre, le SAFE qui doit etre indépendant et à équidistance de toutes les instances n'est pas libre, puisque chacuns de ses adhérents sont quasiment tous en activité et sous la pression des instances pour réussir une carrière. Dès lors, la parole et les intérêts des uns ne servent pas la majorité des autres..."

 Y a t-il des précédents ?

Stéphane Moulin

Ce n'est pas une première en France de voir un arbitre suspendu. En 2003, Stéphane Bré et Stéphane Moulin avaient été sanctionnés tous deux un mois. Le premier avait eu le tort de critiquer publiquement Michel Vautrot, à l'époque Directeur Technique National de l'Arbitrage. Stéphane Moulin avait été écarté des terrains suite à ses critiques envers Frédéric Thiriez et Bernard Saules, Président de l'UNAF (Union Nationale des Arbitres de Football) à l'époque. 

Ennjimi dérange t-il ?

Saïd Ennjimi a fait ses débuts en Ligue 1 le samedi 6 août 2005 lors du match entre le FC. Metz et Le Mans au Stade St-Symphorien. Le début d'une belle et prometteuse carrière. L'arbitre Limougeaud obtient son écusson international en 2008. Communiquant, proche des joueurs, Saïd Ennjimi fait partie de ces arbitres qui privilégient l'esprit à la lettre. Et la DTA n'a pas hésité les saisons précédentes à lui confier des matches de premier plan. Ennjimi, 42 ans compte 196 matches en Ligue 1 ce qui le place dans le top 3 actuel des arbitres les plus expérimentés du championnat. Sa candidature à la présidence de la Ligue Centre Ouest (la 6ème la plus importante de France) en fait tousser quelques uns. A la rencontre des clubs depuis plus d'un an, le discours d'Ennjimi séduit. "Il y a besoin de changement" déclarait-il dans les colonnes de Charente-Libre il y a quelques mois.  Henri Monteil, l'actuel président de la Ligue et ex président du Conseil Supérieur de l'arbitrage ne se représentera plus. L'actuel secrétaire général de la Ligue et ancien président de la CRA (Commission Régionale des arbitres), Stéphane Basq pourrait présenter sa candidature face à l'actuel arbitre de Ligue 1.

 A quelques mois de l'Euro...

L'arbitrage français s'entre-déchire depuis plus d'une décennie. Cette affaire ne survient pas au meilleur des moments. Comme le rappelait le communiqué du SAFE, "c'est une année importante pour le football et l'arbitrage français." En effet, d'ici quelques semaines, on saura si la France comptera un représentant lors du Championnat d'Europe qui se déroulera sur son sol du 10 juin au 10 juillet 2016.

L'avis d'Eric Castellani

" Les enjeux sportifs mais surtout financiers sont un poids trop importants pour les arbitres actuels qui ne soufrent d'aucune indépendance et sont prêts à tous les sacrifices pour réussir leur carrière et nourrir leur ego. Cela a toujours existé, pour etre honnête. Sauf qu'avant,  il y avait un dialogue et des échanges constructifs.

Aujourd'hui on est soit avec, soit contre. Les réunions, animées, houleuses mais fertiles d'idées et de convictions ont laissé place aux silences dévastateurs et à la paleur de charisme étrangement absent. Cela est en grande partie dû aux dirigeants de l'arbitrage qui, ayant souffert de ce constat pendant leur propre carrière, n'hésitent pas à l'appliquer afin de se garantir un silence synonyme d'adhésion. J'ai malgré tout confiance en certains arbitres qui sortent de leur silence, trop souvent en fin de carriere...Mais au final c'est souvent un théâtre où les meilleurs sophistes s'expriment."

Le communiqué de la FFF

L'interview accordée à Pierre Ménès

Lionel